Publications annuelles de l'association - 2011/2022

Plein Feu sur l'eglise Saint-Pierre - Année 2012 - N° 2

Au sommaire

Page 1 (en jpg) : Edito sur les manifestations, réalisations et la communication

Supplément : L’histoire de Saint Gérard de Corbie – Les voies de pèlerinage de Saint-Jacques – Les Sauvetés

Notre 1er Dossier

L’histoire de Saint Gérard de Corbie

Saint Gérard, né à Corbie aux environs de 1020, près d’Amiens, fut, dès son plus jeune âge, habitué à la pratique de la vie religieuse. Sa croyance et ses talents l’élevèrent aux premières dignités de son ordre. Malade, il entreprit avec son Abbé, un voyage à Rome avec, pour objectif, de demander sa guérison mais ses prières ne furent pas exaucées. Au Mont Cassin (Italie), il fut ordonné prêtre par le pape Saint Léon. Ce fut en priant Saint Adalard que miraculeusement, il guérit et il partit alors à Jérusalem prier sur le tombeau du Christ.

Il décida de quitter le nord avec ses compagnons, épris d’absolu et du désir de vivre dans une solitude  la règle de Saint Benoît. A Poitiers, ce fut le Duc Guillaume VIII qui répondit à ses attentes en lui laissant la Grande Forêt de l’Entre Deux Mers « Silva Major ». Au milieu de cette forêt se trouvait un oratoire consacré à Marie, le Saint y posa la première pierre de son monastère le 11 mai 1080.

Le Saint fondateur et ses premiers compagnons placèrent le nouvel établissement sous la protection de la Mère de Dieu. De là son titre : Abbaye de Notre-Dame de la Grande Sauve.

Contre sa volonté qui l’inclinait à l’érémitisme, il devint le premier Abbé fondateur d’un monastère appelé à un grand développement. Les miracles se multipliaient autour de lui dont la réputation de sainteté grandissait dans le pays. Les populations accouraient auprès de « l’Homme de Dieu » et bientôt La Sauve comptait dix mille habitants. Gérard construisit alors deux autres églises pour y exercer son ministère pastoral : Saint-Jean sur l’emplacement des halles et Saint-Pierre, fondée en 1083 qui fût rebâtie à la fin du XIIe siècle et qui est l’église actuelle.

Statue de St Gérard (Abbaye de La Sauve)

D’illustres seigneurs d’Aquitaine prirent l’habit monastique, les Seigneurs locaux accordaient des terres à Gérard et le domaine de l’Abbaye devint considérable.

Les prieurés d’Entre-Deux-Mers, de France, d’Espagne etc. donnèrent au monastère un rayonnement européen.

Le 5 avril 1095 entouré de ses proches, Gérard de Corbie meurt vers l’âge de 75 ans. Il est canonisé par le pape Célestin III le 21 juin 1126.

Au début du XIIe siècle, une assemblée de frères décida que le Saint homme serait transporté hors du tombeau où il avait été primitivement enterré et sa relique placée dans un sépulcre surélevé exposé à la vénération des fidèles.

A la révolution, l’Abbaye devint prison (les derniers moines la quittèrent en 1791), et avec la saisie des objets précieux, le reliquaire de Saint Gérard fut fondu. Ses reliques furent récupérées par Monsieur COLLINEAU de La Sauve et enterrées par un détenu dans le sol du clocher. Après la période révolutionnaire, elles furent remises à l’archevêque de Bordeaux et conservées dans la cathédrale Saint-André. Le 25 août 1847, les reliques du Saint furent remises dans les ruines de l’ancienne abbaye. Lors de la vente des bâtiments par les Jésuites au département, les reliques de Saint Gérard furent alors installées dans un autel spécialement construit dans le collatéral nord de l’église Saint-Pierre de La Sauve où elles demeurent aujourd’hui. Cet autel fut inauguré le 12 janvier 1890 par Monsieur GODEFROY, maire de La Sauve.

En 1995, nous avons fêté le 900ième anniversaire de la mort de Saint Gérard en présence du Cardinal EYT et en 1997, le 800ième anniversaire de sa canonisation.

Tous les ans, au mois de juin, a lieu la fête de Saint Gérard. Cette journée commence par une célébration eucharistique dans l’église Saint-Pierre pour se poursuivre par un apéritif offert par la mairie et un repas partagé tiré du sac dans l’enceinte de l’Abbaye.

Marie-Thérèse GABORIT – Danielle LAFON

Bibliographie :

  • Vie de Saint Gérard de Jean-François DUCLOT
  • Album de la Grande Sauve de Léo DROUYN 1851

Notre 2ème Dossier

Les voies de pèlerinage de Saint-Jacques

Le pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle est l’un des trois grands pèlerinages chrétiens avec Jérusalem et Rome. C’est un pèlerinage catholique dont le but est d’atteindre le tombeau de l’apôtre Saint Jacques le Majeur situé dans la crypte de la cathédrale de Saint-Jacques-de-Compostelle. Saint Jacques était apôtre du Christ et il évangélisa l’Espagne avant de retourner en Palestine, où il fut décapité en l’an 44 sous Hérode Agrippa. Recueillie par ses compagnons, sa dépouille fut portée dans une embarcation qui dériva et s’échoua sur la côte de Galice à Padrón. Vers l’an 800, on découvrit le tombeau de Saint Jacques dans un champ appelé « Campus Stellae » ou « Champ de l’étoile » qui deviendra Santiago-de-Compostela.

C’est vers le 10ème et 11ème siècle que le culte de Saint Jacques étroitement lié à la Reconquista Espagnole se répand en Europe. Mais c’est en 1492 que le pape Alexandre VI déclara officiellement Saint Jacques comme l’un des trois pèlerinages chrétiens. Si l’on ne pouvait aller à Rome ou à Jérusalem, on devait aller à Saint-Jacques.

Suivant les anciennes routes romaines, militaires ou commerciales de l’époque les pèlerins affluaient de toute l’Europe pour vénérer le corps du Saint. Ils rejoignaient l’une des quatre voies principales qui traversaient la France :

  • La Via Turonencis : Tours, Saintes, Bordeaux, Ostabat, pour ceux qui venaient des îles britanniques et de l’Europe flamande….
  • La Via Lemovecensis : Vezelay, Limoges, La Réole, Bazas, Ostabat qui accueillait ceux qui venaient des Pays Nordiques (Allemagne, Danemark, Suède, Pologne, Russie……)
  • La Via Podiensis du Puy en Velay, Moissac, Ostabat, accueillant Allemands, Suisses et ceux qui venaient des Pays de l’Est….
  • La Via Tolosana de Arles, Toulouse, col du Somport, pour ceux qui venaient d’Italie, de Croatie, des Balkans, de Jérusalem…..

Toutes ces voies se rejoignent à Puenta-La-Reina, où débute le « Camino Francès » qui rejoint Saint-Jacques-de- Compostelle. Mais les pèlerins ne suivaient pas toujours les voies principales. Il existe de nombreuses voies secondaires grâce à l’influence de tel monastère ou de tel village. On faisait un détour pour honorer un saint, ou pour être sûr de trouver un refuge, un hôpital, ou trouver des points de passage ou des routes plus en sécurité.

Ainsi en Entre-Deux-Mers, entre la voie de Tours qui passe à Bordeaux et la voie de Vezelay qui passe à La Réole et Bazas, l’Abbaye de La Sauve-Majeure fut un point de passage, de rassemblement, de départ vers les trois pèlerinages de la chrétienté : Compostelle, Rome, Jérusalem. Saint Gérard le fondateur de La Sauve n’est il pas allé à Rome et au Mont Cassin pour se faire ordonner prêtre et à Jérusalem pour prier sur le tombeau du Christ. Il incita ses premiers compagnons à accomplir le pèlerinage à Saint-Jacques avant de les accepter au sein de son monastère. Le pèlerin qui partait de La Sauve laissait ses biens à l’Abbaye, faisait son testament, recevait la panetière et le bourdon et la bénédiction du pèlerin avant d’accomplir son pèlerinage sous la protection de Marie et de Saint Jacques. L’influence de Saint Gérard et de l’Abbaye sur l’Aquitaine, en France et en Espagne fit qu’elle possédait de nombreux prieurés et de nombreux droits de passage qui permettaient aux pèlerins d’y trouver refuge, nourriture et soins. Cette voie secondaire venait d’Angoulême, Coutras, Libourne, Baron, La Sauve pour repartir vers Haux, Le Tourne, où l’Abbaye avait un droit de passage gratuit pour traverser la Garonne. Il y avait multitude de voies en Entre-deux-Mers qui pouvaient rejoindre La Sauve ou passer par Saint-Emilion avant de rejoindre la voie de Tours ou de Vezelay.

Bien que la voie de La Sauve n’est signalée sur aucun guide officiel, il existe dans les cartulaires de La Sauve bien des preuves, comme toutes les donations qui ont été faites par des pèlerins au retour de Saint-Jacques, pour l’accueil qu’ils ont reçu à La Sauve et dans tous les prieurés dépendant de La Sauve. De plus, cette voie est signalée sur les cartographies du Moyen âge.

En 1998, l’UNESCO a inscrit les quatre chemins de Saint-Jacques en France sur la liste du Patrimoine Mondial de l’Humanité et en Gironde quatre sites majeurs : la Cathédrale de Bazas, la Cathédrale et les Basiliques Saint-Michel et Saint-Seurin de Bordeaux, l’église Notre-Dame de Soulac, l’Abbaye et l’église Saint-Pierre de La Sauve, ont été classés Monuments du Patrimoine Mondial de l’Humanité, se trouvant sur les voies de Saint-Jacques-de-Compostelle. En 2004, les Chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle deviennent Grand Itinéraire Culturel du Conseil de l’Europe.

Dans ces dernières années, plusieurs habitants de La Sauve et des environs sont allés à Saint-Jacques, soit en pèlerins, soit en randonneurs, cyclistes ou touristes. En 2010, Année Jubilaire 270 000 pèlerins ont reçu la Compostella, document qui certifie qu’ils ont fait le chemin de Saint-Jacques. La prochaine Année Jubilaire aura lieu en 2021. Est déclarée Année Jubilaire, l’année où la fête de Saint Jacques, 25 Juillet, tombe un dimanche comme c’était le cas en 2010.

Bon pèlerinage jusqu’ à Saint-Jacques et Buen Camino.

Jean-Marie GABORIT

Bibliographie :

  • Origine et Histoire des chemins de Compostelle, Jacques CHOCHEYRAS, éditions Ouest-France
  • Les chemins de Saint Jacques en Gironde,  Francis ZAPATA, éditions Sud-Ouest
  • Les chemins de Compostelle en terre de France, Patrick HUCHET, éditions Ouest-France
  • Guide européen des chemins de Compostelle, Jean BOURDARIAS et Michel WASIELEWSKI, éditions FAYARD

Notre 3ème Dossier

Les Sauvetés

Dés l’époque paléochrétienne les lieux de culte furent des lieux d’asile. Sous les carolingiens cette disposition fut renforcée par l’institution de la Paix de Dieu.

Pour mettre un frein aux violences exercées par l’aristocratie guerrière il se créa une alliance circonstancielle entre le clergé et la paysannerie.

Entre 1050 et 1150 après le 1er Concile de Paix de Charroux en 989, sont créées les « sauvetés » (salvetat en languedocien, sauvetat en gascon) dans le sud ouest de la France, elles ont une fonction colonisatrice et de mise en valeur des terres non rentables.

La fondation d’une sauveté peut être considérée comme la création d’un vaste périmètre carré en rase campagne. Les ecclésiaux se sont des sauvetés placées sous la sauvegarde de Dieu (Salvitas). Il faut toutefois préciser que les personnes qui se réfugient dans les sauvetés ne pouvaient bénéficier d’une quelconque protection si elles étaient prises en «  flagrant délit de crime ». Les règles et les principes de vie de la communauté sont définis par des chartes inscrites dans les cartulaires monastiques.

Ce privilège de Paix est symbolisé concrètement par des croix qui limitent le territoire. Ces zones devinrent des étapes sur le Chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle.

Dans la sauveté deux zones sont distinguées, celle des cultures et celle destinée à accueillir le village.

L’aire d’implantation d’un village est divisée en lots appelés « Casaus » (enclos à bâtir avec jardin) d’une superficie égale, qui varie selon les sauvetés, ainsi que leur nombre. Chaque nouvel habitant reçoit un « Casal » pour y construire sa maison, et s’il demande du terrain de culture « tenure », il sera libre mais devra s’acquitter d’un faible impôt pour son habitat et ses terres de culture.

Parmi les fondateurs des sauvetés quelques évêques. La Sauve Majeure fondée en 1079 dans les forêts de l’Entre-Deux-Mers se lance dés 1080 -1085 dans la création de sauvetés sur ses terres éloignées de l’Abbaye (Gaberret dans les Landes).

Après 1130 le mouvement de fondation se transforme. Les dernières sauvetés créées le sont par association,  entre les établissements  ecclésiastiques et les seigneurs laïcs. Exemple Casteljaloux fondé en 1131 par l’Abbaye de la Sauve Majeure et le Comte d’Albret.

Le temps des sauvetés se termine  vers 1131-1141. Il a duré un siècle.

Dans cet esprit de colonisation furent créées parallèlement aux sauvetés, les bastides (des colonies laïques urbaines), et des « castrums » (villages pourvus d’enceintes collectives subordonnés à des châteaux ).

Claude VENELLE

Bibliographie :

  • Nouvelle approche sur les Sauvetés,Maurice BERTHE, Centre d’Etude des Bastides